mercredi 21 juin 2017

Je t'en foutrai, moi, de la science-fiction


Avec ce titre à l'emporte-pièce, comme un lointain écho à ma Chronomachine lente, qu'elle est même pas à moi d'ailleurs c'est une mobylette quantique que j'ai chouravée à un auteur de SF, cette semaine, je n'ai pas vraiment pas le goût à partager mes choix musicaux.
Ni même à en faire.
Je crois arriver à la fin d'un cycle.
Je n'éprouve plus aucun plaisir à ce petit jeu du "show and tell" qui m'a mené aux confins du chauve en taule.
Enfin, ma prison elle n'a qu'un seul barreau, hein, je peux cesser de tourner autour en le lâchant. 

On connait la chanson. 
J'en ai un peu marre de me goinfrer le disque dur sans que ça améliore ma qualité de vie intérieure.
Je prends beaucoup plus de plaisir aujourd'hui à traduire ou resynchroniser des sous-titres de films ou de séries avec des amis imaginaires évitants sociaux.
C'est le problème des compulsions : l'abondance rassasie, mais la surabondance écoeure.
Je cesse donc de chercher des disques mémorables, de toute façon les acouphènes ont insidieusement émoussé la qualité de mon écoute musicale, et je me recentre IRL pour m'y fabriquer des souvenirs mémorables. Haha.
Ce faisant, j'écoute moins de musique, ça me déconcentre. Si je veux être honnête, quand j'écoute de la musique je n'arrive à faire rien d'autre en même temps.
Je viens de finir de lire "La Horde du Contrevent" d'Alain Damasio, grand livre qui tient autant de la SF que de la la mystique pure. Et le pire, c'est que ça reste compréhensible et aimable.
Bon, d'accord, c'est plutôt de la fantasy, en fait. En temps normal, je pisse contre, mais là j'ai dû traverser par erreur une phase open-minded, ou manger un truc pas frais, je sais pas.
En tout cas, du temps où Le Cafard Cosmique était un site de SF régulièrement actualisé, ils y avaient vu en 2007 « un des meilleurs romans français dans le genre depuis 20 ans », et en avaient apprécié l'« ambition assumée » et la « flagrante originalité ».
C’est pas faux.
J'y pioche une phrase, vers la fin :
« Je m’en sortis parce que je compris, du cœur de mon effondrement, que toute la Horde n’était encore debout sur la lande que par ma faculté active à la faire vivre. La solitude n’existe pas. Nul n’a jamais été seul pour naître. La solitude est cette ombre que projette la fatigue du lien chez qui ne parvient plus à avancer peuplé de ceux qu’il a aimés, qu’importe ce qui lui a été rendu.  »
Ca pisse quand même plus loin que cette répartie pourtant cocasse du prince des ténèbres à Ewan McGregor dans Fargo Saison 3 épisode 9 : « The problem is not that there is evil in the world, the problem is that there is good. Because otherwise, who would care ? »
Ca me rappelle une discussion sur le blog de Li-An où il évoquait Moebius, qui différenciait les artistes qui portaient la mort dans leur travail et ceux tournés vers la vie. 
Damasio est clairement tourné vers la vie.
Et maintenant que je l'ai finie, la Horde, où me ravitailler en bonnes lectures pour l'été depuis le tragique gel du site du Cafard ?
Où trouver l'équivalent pour se faire des stocks en SF vivante maintenant qu'elle est morte ?
Bon, c'est vrai, il y a la sélection SF des Inrocks :
- Les cinq romans de SF indispensables du printemps
- Les 6 romans de SF du moment à ne pas manquer
- Les 8 livres de SF indispensables de ce début d’année
- Les meilleurs livres de SF de cette fin d’année...
Mais c'est les Inrocks, donc attention à la hype.
Enfin, j'ai lu leur spécial Pink Floyd, il était honnête. Faut pas généraliser non plus.
Des fois, y'a des chroniques SF dans le Monde, mais c'est très irrégulier.
Il y a aussi les blogs des anciens du Cafard :
et tous ceux qu'on trouve en lien sur leurs blogs.
Des gens qui ne font que lire, et recracher des articles, bien que je les soupçonne d'aller faire pipi de temps à autre.
Y se lassent pas, eux.
Y z'ont bien de la chance.
Il est vrai qu'en démarrant ce blog en 2009, je disais :
"Sur ce blog, je mettrai en ligne des disques et des BD généralement introuvables voire incunables, afin de ne pas nuire au petit commerce.
Musique pour évaluation : si ça vous plait, soyez gentils d'acheter le disque, qu'on trouve en général si on se donne la peine de chercher."
J'ai un peu dérivé.
Début 2010, j'avais plié boutique pendant 2 ans, remarquant que j'avais fait le tour du compteur et un sacré trou dans la couche de vynile, sans parler de la pile de comics.
7 ans plus tard, je peux dire que j'ai enrichi mes connaissances musicales et affiné mes goûts.
Mais je ne suis plus trop motivé.
Ce coup-ci, c'est pas que ça soit trop chronophage, j'ai réglé ce problème.
C'est plutôt que ma soif d'incunables a été étanchée, et que ça va bien comme ça pour l'instant.
J'ai envie de recommencer à acheter des disques, et à prendre le temps de m'y attacher, plutôt qu'être tout le temps dans le flux.
Dans cette attente, allez en paix.
Et puis c'est aujourd'hui la fête de la musique, évènement qui a fait à la musique ce que Hitler a fait à la Pologne, mais qu'importe, il y a sûrement un groupe de jeunes dans le quartier qui massacre gaiement des reprises de Nirvana, sortez un peu de chez vous, bordel !

14 commentaires:

  1. En même temps, la fête de la musique c’est devenu aussi la fête des apprentis DJ alors merci bien.

    On dirait bien que le blues du blogger a frappé. C’est un truc tout à fait normal. Ça prend souvent au moment des vacances. Ou quand on tombe amoureux. Ou quand on meurt.

    Dans la Horde, il y a quand même un personnage insupportable et ils meurent tous. Oups, j’ai spoilé ?

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  2. Un peu, mon neveu.
    Et je ne peux pas éditer ton comm', donc tu es prié d'assumer la charge morale.
    Sauf qu'ils ne meurent pas tous, il en reste un à la fin.
    C'est qui que tu trouves insupportable ?
    Mon préféré, c'est Caracole, mais ils me plaisent tous, ils incarnent chacun un aspect de l'âme humaine, que ch'trouve.
    Le blues du blogger, je sais pas.
    Le manque d'inspiration, surtout.
    Ceci dit, dans le hors série des Inrocks spécial Pink Floyd, ils conseillaient des disques qui s'inscrivaient dans la continuation, aïe aïe aïe j'ai bien peur d'avoir fait des trouvailles, donc je ne suis pas à l'abri d'une rechute.
    Mais ma muse en a un peu plein le Q (en plus d'avoir du poil aux pattes et un fort accent teuton).

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  3. En fait, je me rappelle plus exactement de la fin. J’ai mis "ils meurent tous" parce que ça faisait rigolo mais tu me mets le doute.

    Ah Caracole, quelle plaie. J’étais sûr que c’était ton chouchou.

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    1. Il incarne la fluidité absolue, le refus de croire à la fiction du Moi. C'est ainsi qu'il a accès aux "paradis énergétiques au-dessous des personnalités", selon la formule de Sloterdijk.
      https://johnwarsen.blogspot.fr/2008/09/clinique-de-la-raison-si-nique.html
      Et en même temps, comme c'est un personnage de fiction, ça ne fait que le renforcer (en tant que personnage) même si sa nature non-humaine [spoil] est à l'origine de son métamorphisme.
      Relis les 5 dernières pages, et remets-nous une couche de [spoil] , qu'on en finisse ! Y'a un twist digne de la planète des Singes !
      « ≈  ]]                          √  ∂
      ¿’  ∫                      ◊  ~
      (·)  X               ¬  ‹›
      ˇ•  ^         ‘,   )-
      ∞  )      π  ∞
      Δ   >
      Ω » !!!!!

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  4. Perso, je ne lis plus guère de SF récente (à part Damasio, justement, même si je trouve qu'il s'écoute un peu trop écrire), mais il y a une bombe qui m'a explosé en pleine tronche voici peu : Bedlam, de Christopher Brookmyre, publié en 2013 et toujours pas traduit par ici depuis.
    Un livre incroyable à partir d'une idée simplissime et hyper-dickienne : le personnage principal comprend après quelques chapitres qu'il n'est qu'un programme informatique, un personnage de jeu vidéo…

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    1. Merci du tuyau, j'irai voir, mais je commence à douter de ma propre nature de programme informatique (j'ai pas mal de virus dans le slip). Alerte le Bélial et l'Atalante ! ils sont encore assez pro-actifs comme éditeurs.

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  5. John, un gars comme toi ne peut pas sincèrement croire qu'il a le choix d'arrêter ou pas son blog. Il faudrait être sacrément bizarre pour croire que tu écris pour toi alors que tu écris pour nous. Ce qui sous-entend que si nous ne sommes pas d'accord il n'y a aucune raison pour arrêter ce qui nous permet encore de croire en l'infime part d'humanité que ce monde abrite. Ne surestime pas ce que ton cerveau te dicte, la douleur est une fausse information créée pour nous forcer à renoncer. Je compte sur toi pour revenir à de meilleurs sentiments. Ton dévoué ami imaginaire. Jean-Jacques.
    PS : on t'aime.

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  6. Alors vous, la belle-mère, ta gueule !
    ;-))))
    J'ai du mal à croire à la dictature du lectorat; pourtant à une époque, ça m'aurait bien plu. Pas de douleur, juste de la lassitude.

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  7. Nan nan tu fais bien d'arrêter. Tu sais ce qu'il te dit ton lectorat...

    La coupe de cheveux bouddhiste est le signe que tu as franchi un cap. Maintenant : Fais gaffe aux coups de soleil.

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  8. Et c'est vrai qu'internet est trop petit pour 2 géants de la pensée humaine (et de la musique inhumaine) comme nous.

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  9. A propos de musique inhumaine je me permets une dernière recommandation:
    https://igorrr.bandcamp.com/album/savage-sinusoid

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  10. Alors là, c'est les prud'hommes.

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  11. Je prends aussi le temps de faire pipi, en mode purple rain, que j'écoute en boucle en ce moment. Bien à toi. SV

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  12. Quand je fais pipi en mode purple rain, je ralentis sur les betteraves.
    Cesser de blogguer, c'est un peu comme décider de s'arrêter de faire pipi : c'est sur la durée qu'on voit si on tient sa résolution ou pas.

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